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SUR LA VALEUR OBJECTIVE DE LA SCIENCE


§ 1. — Introduction.

Les articles de M. Le Roy ont déjà donné lieu à de nombreuses discussions. Dans la première séance de la Société française de philosophie, c’est encore la thèse de M. Le Roy qui a fait l’objet des débats ; je dois donc supposer que cette thèse est familière aux lecteurs de cette Revue.

Je ne saurais l’accepter tout entière. Certes je suis d’accord sur bien des points avec M. Le Roy, et il a même cité, à l’appui de sa manière de voir, divers passages de mes écrits que je ne suis nullement disposé à récuser. Je ne m’en crois que plus tenu d’expliquer pourquoi je ne puis le suivre jusqu’au bout.

M. Le Roy se plaint souvent d’être accusé de scepticisme. Il ne pouvait pas ne pas l’être, encore que cette accusation soit probablement injuste. Les apparences ne sont-elles pas contre lui ? Nominaliste de doctrine, mais réaliste de cœur, il semble n’échapper au nominalisme absolu que par un acte de foi désespéré.

C’est que la philosophie anti-intellectualiste, en récusant l’analyse et « le discours », se condamne par cela même à être intransmissible, c’est une philosophie essentiellement interne, ou tout au moins ce qui peut s’en transmettre, ce ne sont que les négations ; comment s’étonner alors que pour un observateur extérieur, elle prenne la figure du scepticisme ?

C’est là le point faible de cette philosophie ; si elle veut rester fidèle à elle-même, elle épuise sa puissance dans une négation et un cri d’enthousiasme. Cette négation et ce cri, chaque auteur peut les répéter, en varier la forme, mais sans y rien ajouter.

Et encore, ne serait-il pas plus conséquent en se taisant ? Voyons, vous avez écrit de longs articles, il a bien fallu pour cela que vous