Le sentiment de la génération actuelle à l’égard de
la philosophie paraît à première vue contradictoire. Il
est usuel de la dénigrer comme ouvrière d’abstractions
creuses ; et, en même temps, l'on voit fleurir une littérature
philosophique qui passionne un nombreux et
sérieux public. On remarque même que les hommes
d’État, les publicistes, les romanciers, les critiques
recherchent volontiers aujourd’hui les thèmes philosophiques,
et sont aisément loués pour leur profondeur
dès qu’ils les effleurent même très légèrement.
Cette contradiction apparente s’atténue, si l'on considère que ce n’est pas la même manière de philosopher qui est actuellement proscrite et recherchée. On se détourne d’une philosophie séparée des sciences et de la vie, prétendant trouver dans la raison pure tous les éléments, tout l’objet de son existence et de son développement. Volontiers on traite une telle philosophie de formalisme vide, de construction artificielle, de survivance de la scolastique. On n’y voit qu’une satisfaction