Page:Eugène Le Roy - L’Année rustique en Périgord, 1921.djvu/70

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bien, enlevées par une rafale, tourbillonnent comme un vol de sansonnets emportés par la bourrasque.

Le soir, dans les sentiers, les flaques d’eau semblent des miroirs d’acier bruni qui s’étoilent sous le sabot du paysan rentrant au logis. Au ciel, mantelé de noir, passent, chassées par le vent d’ouest, de grosses nuées accourues du golfe de Gascogne. Les pies criardes luttent et s’élèvent contre le vent pour gagner leur enjuchoir nocturne, ce pendant que parfois en haut, des grues rangées en un angle aigu, passent en battant lourdement l’air de leurs ailes.

C’est le temps de la « chasse volante ». Le soir, après souper, au coin de l’âtre, tandis que le vent s’engouffre dans la cheminée, on entend passer dans la nuit des clameurs étranges. Les superstitieux y reconnaissent et distinguent les abois des chiens, le hennissement des chevaux, le claquement des fouets et les huées des chasseurs. Il y a même des vieux qui assurent gravement avoir vu « une fois » la « Dame » qui galope dans le ciel toujours en tête de la chasse, escortée par deux dogues géants. Et, le lendemain, si quelqu’un trouve une terre piétinée ou le regain d’un pré foulé par une bande d’oies sauvages qui ont gîté là, c’est que la « chasse-volante » est descendue en cet endroit.

Mais soudain, les pluies cessent, les ouragans s’apaisent, une accalmie se produit. C’est l’été de la Saint-Martin, dernier sourire de la nature au déclin de l’année.

Après les pluies et les froidures humides, cette arrière-saison a des douceurs exquises. Ce n’est