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Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/249

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Badil et Fréjou réunis. Cette lettre est de monsieur le curé de Vauxains, ci-devant curé de la Jemaye, qui seul fut témoin de l’arrangement : veuillez en prendre connaissance, monsieur le juge.

M. des Garrigues, ayant lu la lettre, eut un mouvement d’humeur, puis dit à Fréjou, comme à regret :

— Si vous n’avez ni écrit ni preuves, que pouvez-vous demander ?… Il ne vous reste qu’à déférer le serment au défendeur…

— Monsieur le juge, dit Badil, nous ne déférerons pas le serment parce que notre adversaire est de ces huguenots qui ne croient pas en Dieu !

— À la bonne heure ! que ce ne soit pas, au moins, pour avoir été convaincu de faux témoignage ! fit tranquillement Daniel en riant.

L’ancien recors, n’ayant à cet égard ni la conscience ni le casier judiciaire bien nets, resta prudemment coi tandis que le docteur s’en allait…


Malgré sa répugnance à reconnaître le mal, cette affaire de Fréjou, venant après toutes les autres manifestations hostiles, ébranlait l’optimisme bénin de Daniel. Mais ce fut bien autre chose lorsqu’il reçut la visite de l’adjoint de la commune chargé de notifier à Sylvia un ordre du procureur du roi : il lui était enjoint de se rendre au domicile de sa mère en vertu des articles 371 et suivants du Code civil, sous peine d’y être conduite par les gendarmes. Alors, Daniel acquit la conviction que les calomnies répandues contre lui, que les querelles et les difficultés à lui suscitées partout, que les actes hostiles dont il était l’objet procédaient d’un dessein suivi, étaient comme les mailles d’un filet dans lequel un ennemi caché