Aller au contenu

Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/322

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Malheureusement, le vendredi, M. Cherrier était mort…

À Saint-Vincent, Daniel trouva Zélie un peu plus attifée que de coutume. Un bonnet de crêpe noir couvrait sa tête sèche d’oiseau rapace ; un col de tulle entourait son long cou, et une robe étriquée, en futaine noire, serrait sa poitrine plate et faisait ressortir ses hanches pointues.

Ensuite des civilités de circonstance, Zélie mena le docteur dans la chambre du défunt, et, après divers propos et des sentences préparatoires comme celle-ci : « Chacun a besoin du sien… Ce qui est juste est juste… Les bons comptes font les bons amis… », elle exhiba le registre et fit lire à Daniel les articles qui le concernaient : elle les avait marqués avec des aiguilles à tricoter placées entre les pages.

Le débiteur avoua, sans barguigner, la réalité des avances faites pour lui par M. Cherrier, en sorte que cette facilité même fit naître un terrible soupçon dans l’esprit de Zélie : « Si son père avait remis un double du testament à Daniel ?… »

Après différentes questions insidieuses qui tendaient à éprouver la valeur de cette hypothèse, elle se rassura, et demanda au docteur, puisqu’il convenait des dettes, de lui faire une reconnaissance en règle de la somme totale, « avec les intérêts », comme elle ajouta. Sur l’acquiescement de l’autre, elle atteignit dans le tiroir de son père une feuille de papier timbré sur laquelle il écrivit cette reconnaissance qu’elle mit incontinent sous clef.

Cette précaution prise, la femme d’affaires fit place à la fille innocente, Zélie baissa les yeux, toussa légèrement, émit cette assertion qu’il y avait des choses difficiles à dire pour une personne dépourvue d’expé-