Page:Eugène Le Roy - L’Ennemi de la mort.djvu/78

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

la Jasse hennit, et lors Daniel, levant la tête, vit au sommet d’une côte une petite caravane qui descendait vers lui. C’était Gary conduisant deux mulets de bât, chargés de bagages, et, puis, derrière, la cuisinière et la chambrière de Légé juchées sur la bastine d’une forte jument.

— Monsieur de Legé est-il loin, Gary ? interrogea le jeune homme dès que l’autre fut à portée.

— Le monsieur et la demoiselle suivent à une petite demi-heure.

— Merci.

Et, renfourchant sa bête, Daniel alla au-devant des voyageurs, qu’il rencontra bientôt.

M. de Légé montait un grand cheval normand à tête busquée ; sa fille était assise de côté sur une fine jument tarbaise, qu’elle mit au galop lorsque Daniel approcha.

— Ne suis-je pas une bonne écuyère ? lui demanda-t-elle en arrêtant net.

— Ma foi, ma cousine, je n’en ferais pas autant, je crois, dans la position où vous êtes ! Au lieu de ce panneau, une selle de femme, à l’anglaise, vous serait bien plus commode pour cavalcader.

— Je verrai donc cela ! fit-elle avec un sourire qui laissait voir ses petites dents brillantes.

Elle était charmante ainsi, assise sur sa bête, une planchette sous ses menus pieds chaussés de brodequins, vêtue d’une robe grise à taille courte, avec une collerette à pointes, et coiffée d’un joli chapeau de feutre pareillement gris, sous lequel foisonnaient des boucles de cheveux châtains. La fraîcheur du matin et le voyage avaient répandu sur ses joues une teinte rosée, délicieuse, et ses grands yeux bruns rieurs regardaient Daniel qui s’oubliait à les admirer.