Page:Eugène Le Roy - Le Moulin du Frau.djvu/40

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Forts, et sa personne était bien répondante à son nom. Il avait le regard en dessous et méchant, comme un taureau qui va donner un coup de corne, et de fait il passait pour traître.

Poncet vit d’abord qu’il avait affaire à une méchante bête, mais il ne s’en étonna pas.

Ce Tombeau-des-Forts avait, à ce qu’on disait, des moyens secrets et des coups de reins auxquels on ne pouvait résister. Cependant le meunier résista, et au bout de dix minutes il fut clair que le lutteur ne pensait plus qu’à se défendre. Toutes ses feintes, toutes ses habiletés ne servaient de rien, et le meunier restait là planté en terre comme un chêne, et ses bras serrant toujours davantage. Enragé, écumant, le Tombeau-des-Forts essaya de passer la jambe, ce qui fit crier tout le monde. Mais Poncet, furieux, ayant repris son aplomb, lui donna, de colère, une serrée terrible qui lui fit faire couic, et l’envoya à trois pas, les quatre fers en l’air, comme un chien dont on se débarrasse.

— Bravo ! bravo ! Et pendant deux minutes, les mains battirent ferme en l’honneur de Poncet.

Le Tombeau-des-Forts se retira en s’époussetant, l’oreille basse et le regard mauvais.

C’était au tour du Colosse du Nord, il s’avança pesamment au milieu de l’arène.

— Si vous êtes fatigué, dit-il à Poncet, nous pourrions remettre la partie à demain.

— Merci bien, mais je ne suis pas fatigué. Le temps de souffler un peu seulement.

Ce Colosse du Nord, n’avait pas volé son nom. C’était un homme de cinq pieds neuf pouces, avec des membres à proportion. Ses cuisses étaient grosses comme le corps, et ses bras gros comme les cuisses d’un homme ordinaire ; avec ça des épaules à porter un bœuf et des poings à l’assommer. Par exemple, il y avait de la graisse dans ce grand corps,