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Page:Eugène Le Roy - Mademoiselle de la Ralphie, 1921.djvu/246

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du soufre et d’une horrible pourriture des corps. Ce cauchemar le poursuivait dans un demi-sommeil pénible, dans une torpeur fatigante qu’il ne parvenait pas à secouer. Par moments, il ouvrait les yeux et cherchait à repousser ces visions dans un avenir lointain qui lui laisserait le temps de faire pénitence ; mais une invincible fatigue lui fermait les yeux et le replongeait dans l’infernale fantasmagorie.

Après une nuit passée dans ces angoisses, le jour parut et la réalité pressante se dressa devant le pauvre vicaire. De doute sur son état de péché il n’en avait pas ; les rêves de la nuit l’avaient confirmé dans une désolante certitude. Il lui fallait donc se déterminer promptement, prendre un parti : ou aller, dès son lever, se confesser au curé Turnac, ou bien imiter ces prêtres sacrilèges qui consacrent et consomment le corps de Jésus-Christ en état de péché mortel. Cette alternative lui causait une souffrance véritable, car sa foi très réelle lui représentait vivement l’horreur d’une semblable profanation ; et, d’autre part, il reculait devant un aveu qui l’eût perdu.

Dans cette perplexité, il se leva, se mit à genoux devant son lit, et là, la tête dans la couverture, il pria avec ferveur le Dieu très miséricordieux de l’éclairer.

Le soleil se glissait déjà dans la chambre de l’abbé par l’interstice des contrevents mal joints, lorsqu’il lui vint une inspiration qu’il prit pour un effet de son oraison. Comment n’avait-il pas songé à cela en vérité ? Il resterait au lit le matin, sous le prétexte d’une indisposition, et il aurait tout un grand jour pour réfléchir à sa situation.

Le curé Turnac ne voyant pas descendre son vicaire