Aller au contenu

Page:Eugène Le Roy - Nicette et Milou, 1901.djvu/59

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Il défait la coulisse de la chemise de grosse toile, et, sur la poitrine où pointent deux tout petits seins naissants, il pose sa grosse tête à cheveux rouges crépus, et prête l’oreille. La forte odeur de rousseau soulève le cœur de la petite malade, et la rude barbe de trois jours pique sa peau délicate ; et puis la honte la ferait rougir si elle avait du sang assez. M. Rudel n’entend rien, rien que les battements précipités d’un petit cœur épeuré. Il se redresse et la palpe.

— Tu ne sens pas de mal là ?

— Non, monsieur Rudel.

— Et là ?… Ton estomac est gonflé.

Oh ! non, elle ne sent pas de mal à l’estomac ! Si elle osait, elle dirait qu’elle est guérie, tant elle souffre de se voir ainsi découverte sous l’œil dur du « chirurgien » et de sentir ses grands doigts poilus se promener sur elle.

Lui a fini son examen ; il la recouvre et, instinctivement, cherche sa trousse… Va-t-il la saigner ?… Non : il réfléchit qu’il ne sera jamais payé de cette visite… Une paire de poulets de