Page:Eugene Simon - La Cité chinoise, 1891.djvu/184

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beaucoup de petits patrons, vivant d’un ou de plusieurs métiers, heureux et paisibles au sein de leur famille, comme des gens pour qui le lendemain n’a point d’angoisses. Eh bien ! croyez-vous que toute cette population verra sans déplaisir les grands capitaux, accumulés en peu de mains comme ils le sont en Europe, envahir leur pays, y prendre leurs allures ordinaires, monopoliser la terre et l’industrie, convertir en salariés cette foule de petits patrons, les enlever à leurs familles pour les concentrer dans de grands ateliers et les plonger peu à peu dans l’instabilité et l’insécurité des populations ouvrières d’Europe ? Et maintenant, serait-ce voir les choses trop en noir que de prédire un temps où il se produira au Tonkin, contre les étrangers, quelque chose d’analogue au mouvement antisémitique auquel nous assistons en Europe ? Je ne sais ; mais plus j’y pense, plus je crois que décidément nous n’allons faire au Tonkin que de mauvaise besogne. Est-ce à dire pourtant qu’il n’y avait rien à faire ? Assurément non. — Il faut reprendre les choses à l’origine. — Ce qui n’est au Tonkin ni un rêve, ni une fiction, mais une réalité tangible et positive, ce n’est pas le Tonkin lui-même : ce sont les mines situées en dehors de son territoire proprement dit, sur les frontières de la Chine, ainsi que dans les provinces occidentales de celle-ci, et qui ne peuvent être exploitées que par le Tonkin, c’est-à-dire par le fleuve qui le traverse. C’est encore, mais à un degré moindre, le commerce à établir