Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/267

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ne règnent plus, ou que de nouvelles lois sont établies maintenant parmi les hommes, puisque tu as conscience de t’être parjuré envers moi. Hélas ! vois cette main que tu as tant de fois pressée, et ces genoux vainement embrassés par un homme perfide ! Hélas ! j’ai perdu toute espérance ! Mais, allons ! je te parlerai comme à un ami, n’ayant cependant rien de bon, certes, à attendre de toi ; je te parlerai, car, ainsi interrogé, tu n’en seras que plus couvert de honte. Maintenant, de quel côté me tournerai-je ? Vers la demeure de mon père et ma patrie que j’ai trahie en venant ici ? Vers les misérables filles de Pélias ? Certes, elles me recevraient bien dans leurs demeures, elles dont j’ai tué le père ! Voilà ma destinée. Je suis odieuse à mes amis domestiques, à qui je n’aurais dû faire aucun mal, et c’est pour toi que je m’en suis fait des ennemis. Et, en retour de ces bienfaits, tu m’as rendue la plus heureuse femme de la Hellas ; et malheureuse que je suis ! je possède en toi un fidèle et admirable mari ! Tellement, que je vais fuir, exilée de ce pays, privée d’amis, seule avec mes enfants abandonnés. Certes, ce sera une illustre renommée pour un nouvel époux, que ses fils soient mendiants et vagabonds, ainsi que moi qui t’ai sauvé ! Ô Zeus ! pourquoi as-tu donné aux hommes des signes certains pour reconnaître l’or vrai de l’or faux, tandis qu’il n’est aucun signe visible qui fasse reconnaître le méchant parmi les hommes ?

LE CHŒUR.

La colère est chose terrible et plus difficile à guérir qu’une querelle entre amis.

IASÔN.

Il faut, semble-t-il, que je ne sois pas inhabile à parler