Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/330

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PHAIDRA.

Par les Dieux ! je t’en supplie, — tes paroles sont douces mais honteuses, — ne va pas au delà ! En effet, j’ai soumis honnêtement mon âme à cet amour ; mais si tu veux embellir ce qui est honteux, je tomberai dans le mal que je fuis, et j’y périrai.

LA NOURRICE.

S’il te semble ainsi, il ne fallait pas faillir ; mais si tu as failli, obéis-moi, et accorde-moi cette seconde grâce. J’ai dans la demeure des philtres qui apaisent le désir. La pensée m’en vient à l’esprit. Sans qu’il y ait rien de honteux pour toi, et sans que tu en perdes la raison, ils te délivreront de ce mal, si tu n’es pas lâche. Mais il faut quelque signe de celui que tu aimes, quelque morceau de ses vêtements, pour faire un seul désir de deux amours.

PHAIDRA.

Se sert-on de ce philtre en onction, ou faut-il le boire ?

LA NOURRICE.

Je ne sais. Permets que je te vienne en aide, ma fille, et non que je te réponde.

PHAIDRA.

Je crains que tu ne sois que trop habile pour moi.

LA NOURRICE.

Tu crains tout. Que redoutes-tu ?