Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/194

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jeune, ô lamentable cadavre ! Hélas ! Et tous ces baisers, tous mes soins pour l’élever, tant de sommeils interrompus, sont perdus ! Quelle parole le poète écrira-t-il sur ta tombe ? — Les Argiens, dans leur terreur, ont tué autrefois cet enfant ! — Et cette inscription sera un opprobre pour la Hellas ! Mais, ô déshérité des biens paternels, tu posséderas au moins le bouclier d’airain dans lequel tu seras enseveli ! Ô bouclier qui, autrefois, couvrais le beau bras de Hektôr, tu as perdu ton noble maître ! La marque de son cher bras est restée dans ton anneau, et sur ton beau contour voici la sueur que Hektôr répandait de son front, au milieu de ses fatigues, quand il t’approchait de ses joues ! Apportez, apportez, pour orner ce lamentable cadavre, tout ce que nous possédons encore ! et, si un Daimôn ne permet pas que je t’honore richement, reçois les seules choses qui me restent. Il est insensé celui d’entre les mortels qui, se flattant d’être toujours heureux, se plaît dans la joie. Et la fortune est semblable à un homme en démence ; elle roule ça et là, et nul n’est sans cesse heureux.

LE CHŒUR.

Celles-ci t’apportent dans leurs mains ce qui reste des richesses Phrygiennes, afin que tu ornes ce cadavre.

HÉKABÈ.

Ô fils, tu n’as vaincu tes rivaux ni par les chevaux, ni par l’arc, auxquels sont accoutumés les Phryges qui ne s’y livrent pas sans mesure. Ta mère ne peut te vouer les ornements de ton père, qui autrefois faisaient partie de tes richesses. Maintenant, Hélénè, haïe des Dieux, te les a