Page:Euripide - Electre, 1908, trad. Herold.djvu/16

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Égisthe. Mais jamais le mari d’Électre — qu’en témoigne pour moi Kypris — n’a déshonoré sa couche, et vierge elle est encore. J’ai honte, ayant reçu l’enfant d’hommes très nobles, de l’outrager, moi qui ne suis pas digne d’elle. Et je souffre à songer que mon beau-frère de nom, le malheureux Oreste, s’il revient dans Argos, verra le triste mariage de sa sœur. Qui me dit fou d’avoir reçu dans ma maison la jeune vierge et de ne l’avoir pas connue mesure la sagesse aux règles d’un esprit pervers, qu’il le sache : c’est lui qui agirait en fou.

De la maison sort Électre ; elle porte une cruche sur la tête.
ÉLECTRE, au seuil de la maison.

Ô nuit noire, ô nourricière des astres d’or, où, portant sur la tête la charge de ce vase, je m’en vais aux sources du fleuve : non que j’en sois venue à ce point de misère, mais je veux que les Dieux voient l’injure d’Égisthe, et je veux, dans le large éther, jeter mes plaintes vers mon père ! Car la désastreuse Tyndaride, ma mère, m’a chassée des demeures, pour plaire à son mari. Et ayant enfanté d’autres enfants d’Égisthe, elle nous traite, Oreste et moi, comme les rebuts des demeures.

Elle descend vers la route.
LE PAYSAN.

Et pourquoi, malheureuse, peiner à me servir, t’infliger des labeurs, toi dont la vie fut douce, et, quand je t’y engage, ne pas te reposer ?

ÉLECTRE.

Moi, je te tiens pour un ami égal aux Dieux, car tu ne m’as pas outragée dans mes malheurs ; et c’est pour les mortels une grande faveur du sort de trou-