Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 1.djvu/63

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 misérablement, aucun n’a échappé. Voilà ce que j’avais à te dire en commençant : maintenant je viens à lui, et je vais lui répondre. — Comment peux-tu dire que c’est pour épargner aux Grecs de nouvelles peines, et pour servir Agamemnon, que tu as fait périr mon fils ? Mais d’abord, ô le plus méchant des hommes, jamais la race des Barbares ne sera amie des Grecs, et elle ne le pourrait pas. Mais quelle faveur étais-tu donc si empressé d’obtenir ? Recherchais-tu quelque alliance ? avais-tu quelque parenté ? Quel motif avais-tu ? Craignais-tu que, traversant une seconde fois les mers, ils ne vinssent ravager tes moissons ? A qui penses-tu faire croire de tels mensonges ? Parle vrai ; c’est son or, c’est ta cupidité insatiable qui a tué mon fils. En effet, réponds à ceci : Pourquoi, tandis que Troie prospérait, que ses tours défendaient encore son enceinte, que Priam était vivant, que la lance d’Hector était formidable (50) ; pourquoi, si tu voulais servir Agamemnon, n’immolas-tu pas alors mon fils, que tu élevais dans ton palais ? ou pourquoi ne le livras-tu pas vivant aux Grecs ? Mais c’est lorsque nous ne jouissions plus de la lumière du jour, et que la fumée qui s’élevait de Troie annonçait sa ruine, que tu as égorgé ton hôte réfugié dans tes foyers ! Écoute encore de nouvelles preuves de ta scélératesse. Il fallait, puisque tu étais l’ami des Grecs, leur porter cet or, qui, de ton propre aveu, appartenait, non à toi, mais à mon fils ; il fallait le porter aux Grecs indigents, et depuis longtemps éloignés de leur patrie. Mais maintenant même tu crains de le laisser échapper ; tu persévères à le garder dans ton palais. Certes, en élevant mon fils comme tu le devais, et en le sauvant, tu te serais couvert de gloire ; car c’est dans l’infortune que les vrais