Page:Euripide - Théâtre, Artaud, 1842, tome 2.djvu/190

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fournirait avec profusion à toutes tes dépenses ; le palais de Ménélas ne suffisait pas à ton luxe et a ton goût effréné des plaisirs. Mais non, dis-tu, c'est mon fils qui t'enleva de force. Quel Spartiate a été témoin de ta résistance ? Tes cris invoquèrent-ils le secours de Castor ou de Pollux, tes frères, qui n'habitaient pas alors le séjour des dieux ? Arrivée à Troie, où les Grecs suivirent bientôt tes pas, quand la guerre fut engagée, si l'on t'annonçait quelque succès de Ménélas, tu le vantais aussitôt, et mon fils s'affligeait de cette rivalité redoutable pour son amour; si les Troyens étaient heureux, cet époux n'était plus rien pour toi. Tes vœux suivaient la fortune, ton coeur était pour elle, et non pour la vertu. Et maintenant tu parles de tes efforts pour te dérober avec des cordes, eu te laissant glisser du haut de ces murs, où tu restais malgré toi ! Mais quand te surprit-on à aiguiser le poignard, ou à suspendre le lacet fatal? C'est ce qu'aurait fait une femme généreuse qui eût regretté son époux. Combien de fois ne t'ai-je pas adressé ces conseils :« Pars, ma fille, laisse mon fils contracter d'autres alliances ; je t'aiderai à gagner furtivement les vaisseaux des Grecs ; fais cesser la guerre entre eux et nous. » Mais ces avis te semblaient amers ; tu régnais avec hauteur dans le palais de Paris, et tu voulais être adorée par les Barbar res. Voilà ce qui était grand à tes yeux. Et, après cela, tu pses encore te parer, et tu respires, le même air que ton époux ! Q femme abominable, qui devrais bien plutôt paraître humble et tremblante, couverte de vêtements déchirés, la tête scalpée à la manière des Scythes (46), et racheter tes fautes à force de modestie, au lieu de les aggraver par ton impudence! Ménélas, pour en venir à la conclusion de