Page:Europe, revue mensuelle, No 95, 1930-11-15.djvu/94

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

XI

QUAND on veut changer d’air à Aden, on peut se diriger vers Lahej, dans les terres, ou vers Djibouti.

Si l’on va du côté de Lahej, c’est pour voir de l’herbe.

Les autos marchent en tanguant dans le désert, elles se lancent pour franchir des collines de sable qui les saisissent comme des ventouses. Des Arabes dans les haltes donnent des feuilles à leurs chameaux agenouillés. On passe près d’une colline de tessons qui passe pour témoigner du passage d’Albuquerque, c’était en 1519. Au bout de quelques heures des arbres se lèvent, on arrive en vue de Lahej, ville de poussière avec ses maisons de poussière, des palmiers de poussière.

Le palais du sultan est un bâtiment de corail gris : il a un toit plat à balustres, des files de fenêtres, des attiques, des colonnes corinthiennes. Dans le jardin des paquets de feuilles de tabac sèchent sur des ficelles. Il y a des boules de verre dépoli, pour y lire l’avenir, comme dans la grande banlieue près de Paris.

On entre. En haut d’un escalier nu, un grand Arabe en veston de soie rayée, rouge et jaune, vous prie d’attendre dans la salle d’audience. C’est un grand salon dans la pénombre, les volets sont fermés contre le soleil. Aux murs pendent les photographies couleurs et grandeur naturelle du père et de l’oncle du sultan régnant. Les tapis qui viennent de Paris, sont roulés et ficelés dans un coin comme si le sultan était au bord de la mer ou donnait le soir même une