Page:Europe (revue mensuelle), n° 97, 01-1931.djvu/68

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Ils virent leurs enfants longer la rivière, les visages embrasés par le soleil, heureux.

— Tu vois ! dit Andréï ; Que veux-tu de plus ?

— Je veux ma fille.

Leurs paroles furent entendues par les deux amants, qui s’arrêtèrent comme foudroyés, devant le spectacle inattendu que leur offraient leurs pères. Minnkou voulut s’élancer, furieux. Minnka le retint avec fermeté. Et lui mettant les deux mains sur les épaules, lui dit, tout bas :

— Écoute-moi. Nous ne pouvons rien contre notre destin. Je vais avec mon père et j’épouserai Sima, mais… je ne serai jamais à lui. C’est toi qui seras mon barbatt, à son nez. Ainsi, il me chassera un jour. Et alors personne n’aura plus rien à dire. Minnkou laissa sa tête tomber sur la poitrine. Minnka l’embrassa violemment et prit le chemin de la maison paternelle.


SIMA ET SON BIEN-ÊTRE


Sima Caramfil possédait à Braïla de belles acareturi, comme on nomme là-bas tout immeuble ; mais, immeuble ne désigne pas aussi bien que acareturi tout ce qu’un Sima possédait à Braïla.

C’est que, d’abord, les Sima eux-mêmes ne viennent au monde que dans ces pays-là. Ils y viennent, toujours, « pauvres collés à la terre », bons et circonspects, audacieux et lâches, inventifs et médiocres, généreux et avares, enthousiastes et rigides, malins et bornés. Ils font toujours fortune. Parfois, ils parviennent à des richesses fantastiques. Ils sont incapables de se ruiner par imprudence, mais ils se rui-