Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/269

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Pendant que nous faisions, en contrebande, cette singulière correspondance, notre rusé chrétien continuait toujours sa ronde dans les divers quartiers du palais communal, sans oublier de frapper, de temps en temps, sur son instrument de bambou, les veilles de la nuit. Quand la lettre fut terminée, il la prit, la cacha avec soin dans les plis de sa ceinture, et se remit tranquillement à sa manœuvre.

Les Chinois ont toujours à leur disposition, pour toutes les circonstances, un trésor inépuisable de ruses et de supercheries. Les chrétiens de Tchoung-king, voulant nous faire parvenir en secret la lettre de monseigneur Desflèches, avaient imaginé de s’introduire de nuit dans le palais communal. L’un d’eux, pauvre artisan, ne pouvant, par sa position sociale, exciter aucun soupçon, se présenta aux gardiens en qualité de veilleur de nuit, ayant soin de demander un salaire bien inférieur à celui qu’on donne ordinairement aux gens qui exercent ce genre d’industrie. Son offre fut acceptée à la grande satisfaction des chrétiens de Tchoung-king, qui durent se trouver heureux de nous faire parvenir leur lettre, et peut-être un peu aussi d’avoir pu jouer un tour à la police ; car les Chinois ne sont pas tout à fait insensibles à cette singulière jouissance des vieux peuples civilisés.

Les gardiens de nuit sont très à la mode dans toutes les provinces de la Chine ; ils sont surtout régulièrement employés dans les pagodes, les tribunaux et les hôtelleries ; les riches particuliers en ont aussi à leur service. Ces hommes sont obligés de se promener pendant toute la nuit dans les endroits confiés à leur vigilance, et de faire du bruit en frappant, par intervalles, sur un tam--