Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/294

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cour un regard rapide, mais suffisant pour lui faire remarquer que celui qui allait le juger n’était pas un mandarin du Céleste Empire. Il se prosterna en souriant, et après avoir salué le président, en frappant la terre trois fois du front, il se releva pour adresser à chaque juge une profonde inclination. Lorsqu’il eut parcouru de la meilleure grâce du monde sa série de salutations, il se mit à genoux, car, d’après la loi chinoise, c’est dans cette posture que doivent être les accusés devant leur juge. Nous l’invitâmes à se relever, en lui disant que nous serions peinés de le voir à genoux devant nous, parce que cela n’était pas conforme aux usages de notre pays. — Oui, dit le préfet, tiens-toi debout puisqu’on te le permet. Maintenant, ajouta-t-il, comme les hommes de ces lointaines contrées n’entendent pas, sans doute, facilement ton langage, je vais moi-même faire l’interrogatoire. — Non, cela ne se peut pas. Votre crainte est sans fondement ; vous allez voir que nous pouvons très-bien nous entendre avec cet homme. — Oui, dit l’accusé, ce langage est pour moi blancheur et clarté ; je le comprends sans hésitation. — Puisque la chose est ainsi, dit le préfet, un peu déconcerté, tu vas répondre avec droiture et simplicité de cœur aux questions qui te seront adressées.

Nous procédâmes donc à l’interrogatoire dans la forme suivante : — Comment t’appelles-tu ? — Le Tout Petit[1] porte le nom vil et méprisable de Tchao ; le nom que j’ai reçu au baptême est Simon. — Quel âge as-tu ? d’où es-tu ? — Il y a trente-huit ans que le Tout

  1. C’est ainsi que doivent se qualifier les Chinois en présence des mandarins.