Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/301

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que le Chinois se dira, en tremblant, siao-sin, rapetisse ton cœur, le Français, au contraire, se redressera en s’écriant : Prends garde ; il se servira d’une expression qui ne peut convenir qu’à une race guerrière qui, en présence d’un ennemi, prend instinctivement la garde de son épée.

A notre départ de Leang-chan, nous fûmes l’objet d’une magnifique ovation. La nouvelle de cette fameuse séance nocturne au premier tribunal, sous la présidence d’un diable de l’Occident, s’était répandue partout, et les riches imaginations de la localité n’avaient pas manqué, sans doute, de charger leurs récits d’une foule de merveilleux épisodes. Aussi, dès que le soleil parut, tous les habitants de la ville se portèrent avec empressement vers les endroits par où nous devions passer. Tous les mandarins, en costume de cérémonie, s’étaient réunis au palais communal, pour nous faire leurs adieux. Après nous avoir accablés des formules les plus élogieuses et les plus extravagantes, ils nous accompagnèrent jusqu’à la rue, et ne voulurent rentrer que lorsqu’ils eurent bien installé dans les palanquins leurs collègues de la nuit précédente. Partout, sur notre passage, la foule était immense, bruyante et d’une avidité fiévreuse pour jeter un coup d’œil sur notre personne, ou, du moins, sur notre bonnet jaune. Les chrétiens étaient réunis par groupes, de distance en distance, et nous vîmes avec bonheur qu’ils étaient capables d’une manifestation un peu courageuse. Tous portaient leur chapelet pendu au cou, et, quand nous arrivions vers eux, ils se jetaient à genoux, faisaient un grand signe de croix et nous demandaient