Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 1.djvu/305

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La servitude publique et privée des femmes, servitude que l’opinion, la législation et les mœurs ont scellée de leur triple sceau, est devenue, en quelque sorte, la pierre angulaire de la société chinoise. La jeune fille vit enfermée dans sa maison, occupée exclusivement des soins du ménage, traitée par tout le monde, et surtout par ses frères, comme une servante dont on a droit d’exiger les services les plus bas et les plus pénibles. Les plaisirs et les distractions de son âge lui sont inconnus ; toute son instruction consiste à savoir manier l’aiguille ; elle ne doit apprendre ni à lire, ni à écrire ; il n’y a pour elle ni école, ni maison d’éducation ; elle est condamnée à végéter dans l’ignorance la plus absolue et dans l’isolement le plus complet, jusqu’à ce qu’on songe à la marier ; alors seulement on s’occupe d’elle ; mais l’idée de sa nullité est poussée si loin, qu’elle n’entre pour rien dans les négociations de cet acte, le plus grave et le plus décisif dans la vie d’une femme ; la consulter, lui faire connaître son futur époux, lui en dire même le nom, serait considéré comme une ridicule superfluité. La jeune fille est comme un objet de trafic, un article de marchandise ; on la vend au plus offrant, sans qu’elle ait le droit de faire la moindre question sur la qualité ou le mérite de l’acquéreur. Le jour des noces, on est plein de sollicitude pour la parer et l’embellir ; elle est couverte de splendides vêtements de soie étincelants d’or et de broderies ; ses belles nattes de noirs cheveux sont diaprées de fleurs et de pierreries ; on vient la chercher en grande pompe ; les musiciens entourent le brillant palanquin où elle siège comme une reine sur son trône. Le bonheur va donc enfin com-