Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/132

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Après avoir traversé le lac Ping-hou, nous rentrâmes dans nos palanquins et nous arrivâmes, vers la nuit, à Han-yang, grande ville située sur le bord du fleuve Bleu. Déjà les marchands allumaient leurs lanternes sur le devant des boutiques, et les groupes nombreux d’artisans, après avoir terminé leur travail, s’en allaient en chantant et en folâtrant voir jouer la comédie. Les curieux se rassemblaient aux angles des rues, autour des escamoteurs et des lecteurs publics. Tout prenait enfin cette allure vive et animée des grands centres de population, lorsque, après les fatigues d’une journée laborieuse, chacun éprouve le besoin de prendre un peu de repos et de délassement.

Les Chinois n’ont pas l’habitude de la promenade ; ils n’en conçoivent ni les charmes ni les avantages hygiéniques. Ceux qui ont quelques notions des mœurs européennes nous trouvent fort singuliers, pour ne pas dire souverainement ridicules, d’aller et de venir sans cesse, sans avoir d’autre but que celui de marcher. Lorsqu’ils entendent dire que nous considérons la promenade comme une manière de nous délasser et de nous récréer, ils nous tiennent pour de grands originaux ou pour des hommes qui n’ont pas le sens commun.

Les Chinois des provinces intérieures, que leurs affaires conduisent à Canton ou à Macao, n’ont rien de plus pressé que d’aller voir les Européens à la promenade. C’est pour eux le spectacle le plus attrayant. Ils s’arrangent à l’écart le long des quais ; ils s’accroupissent sur leurs mollets, allument leur pipe, déploient leur éventail, et puis les voilà contemplant d’un œil goguenard et malicieux les promeneurs anglais et américains