Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/284

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nous étions seul avec un jeune chrétien de Ou-tchang-fou, qui nous servait de guide. Voici ce que nous écrivions, à cette époque, à nos frères de France : « Les restes précieux de M. Clet et de M. Perboyre reposent côte à côte, sur une verte colline, au delà de la ville de Ou-tchang-fou. Oh ! qu’elle fut enivrante l’heure que je passai auprès de ces deux modestes tombes de gazon ! Sur une terre idolâtre, au milieu de l’empire chinois, j’avais deux tertres sous mes yeux, et une félicité inconnue remplissait et dilatait mon âme. On ne voit pas de marbre ciselé sur la terre qui recouvre les ossements des deux glorieux enfants de saint Vincent de Paul ; mais Dieu semble s’être chargé lui-même des frais du mausolée ; des plantes rampantes et épineuses, assez semblables par la forme à l’acacia d’Europe, croissent naturellement sur les deux tombes. Au-dessus de ce tapis de verdure surgissent avec profusion des mimosas remarquables de fraîcheur et d’élégance. En voyant toutes ces brillantes corolles s’échapper à travers un épais tissu d’épines5 on pense involontairement à la gloire dont sont couronnées dans le ciel les souffrances des martyrs. »

Les deux précieuses tombes étaient encore dans le même état ; rien n’avait été changé ; les pierres et les inscriptions nous parurent intactes. Seulement, le temps des fleurs était passé, et les mimosas n’épanouissaient plus parmi la verdure leurs fraîches corolles. L’herbe était desséchée, et quelques cordons de liserons sauvages, dépouillés de leurs feuilles, rampaient d’une tombe à l’autre, comme pour les unir, les envelopper toutes deux dans une même trame.