Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/289

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que nous rencontrions tous les jours dans la province du Sse-tchouen. Nous étions à nous épanouir dans un frais jardin, à l’ombre des larges feuilles d’un massif de bananiers, lorsque le Saule pleureur s’en vint à nous, et, nous regardant par-dessous ses lunettes et à travers ses larmes, nous adressa ces intéressantes paroles : — Le gardien de l’établissement n’est chargé que de nous loger ; le tribunal lui a fait dire qu’il n’avait pas à s’occuper des vivres. — C’est donc l’administration qui s’en avise ; on nous enverra, sans doute, le dîner du tribunal ? — Nullement ; on m’a dit que le tribunal ne devait pas s’en mêler. — Qui donc a-t-on chargé de ce soin ? — Personne, nous répondit le Saule pleureur, en étendant piteusement vers nous sa main droite, pendant que, de la gauche, il étanchait l’humidité de ses yeux avec un lambeau de toile blanche. — Personne ! nous écriâmes-nous en nous levant aussitôt de nos sièges ; qu’on fasse venir les porteurs de palanquin et qu’on nous conduise chez le préfet de la ville… Le Saule pleureur, qui n’était pas accoutumé à nos procédés diplomatiques, fut saisi de frayeur ; mais Wei-chan le tranquillisa en lui disant que nous avions fait ainsi tout le long de la route, et qu’il n’en était résulté aucun malheur.

Les porteurs de palanquin arrivèrent aussitôt et nous partîmes pour le palais du préfet. Nous avions recommandé à nos porteurs d’entrer rondement dans la cour intérieure, sans s’arrêter à la porte. La consigne fut ponctuellement observée ; mais le portier, à la vue de celte façon inusitée de s’introduire dans le tribunal, courut après nous pour nous demander où nous allions. —