Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/330

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Et si l’orage éclate ? — Il faudra se résigner ; nous ne voyons rien de mieux pour le moment… Notre conducteur ne s’habituait pas facilement à cette idée de résignation ; il revenait sans cesse à la charge, se figurant toujours que nous finirions par trouver quelque moyen extraordinaire de conjurer l’orage, ou un expédient quelconque pour nous mettre à l’abri. Il avait l’air de croire que des gens comme nous ne devaient pas être embarrassés dans un cas semblable.

Heureusement il n’y eut pas d’orage. Après ces premières gouttes, qui se précipitaient sur la terre larges comme des sapèques, la pluie se mit à tomber tout bonnement, avec un calme et une régularité admirables. Cela dura ainsi pendant la journée tout entière, et personne n’y trouva le moindre inconvénient. L’atmosphère, qui, auparavant, était étouffante, devint d’une délicieuse fraîcheur. La boue n’était pas à craindre, car nous marchions sur un terrain sablonneux, et d’ailleurs si sec, si altéré, qu’il buvait avec une insatiable avidité toute l’eau qui descendait du ciel. Les porteurs de palanquin paraissaient tout heureux de sentir tomber la pluie sur leur dos, et de se procurer si facilement les jouissances prolongées du bain ; ils riaient aux éclats, chantaient de toute leur âme, et s’acquittaient, en se jouant, de leur pénible fonction. Les piétons et les cavaliers de la troupe n’étaient pas moins à leur aise ; la tète nue et n’ayant qu’un simple caleçon pour tout vêtement, ils savouraient avec délices la fraîcheur de la pluie. Nous leur portions envie ; mais les exigences des rites nous faisaient un devoir impérieux de rester enfermés dans nos palanquins.