Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/383

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le monde y est admis. C’est du communisme dans toute la force et la rigueur de l’expression. Chacun se fait son nid, s’arrange comme il l’entend sur cet océan de plumes, et y dort comme il peut. Quand paraît le jour, il faut déguerpir, et un des commis de l’entreprise perçoit à la porte la sapèque fixée par le tarif. Pour rendre hommage, sans doute, au principe d’égalité, on n’admet pas le système de demi-place, et les enfants sont obligés de payer autant que les grandes personnes.

Dans les premiers temps de la fondation de cette œuvre éminemment philanthropique et morale, l’administration de la Maison des plumes de poule fournissait à chacun de ses hôtes une petite couverture ; mais on ne tarda pas à modifier ce point du règlement. Les communistes de l’établissement ayant contracté l’habitude d’emporter les couvertures pour les vendre ou en faire un vêtement supplémentaire durant les froids rigoureux de l’hiver, les actionnaires s’aperçurent qu’ils marchaient rapidement à une ruine complète et inévitable. Supprimer entièrement les couvertures eût été trop cruel et peu décent. Il fallut donc chercher un moyen capable de concilier les intérêts de l’établissement et la bonne tenue des dormeurs. Voici de quelle manière on est parvenu à la solution de ce problème social. On a fabriqué une immense couverture en feutre, d’une dimension tellement prodigieuse, qu’elle peut abriter le dortoir tout entier. Pendant le jour elle est suspendue au plafond comme un baldaquin gigantesque. Quand tout le monde s’est couché et bien aligné dans la plume, on la fait descendre au moyen de plusieurs poulies. Il est bon de remarquer qu’on a eu soin d’y pratiquer une