Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/466

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adieu à notre jonque mandarine, et nous rentrâmes dans nos palanquins. Au soleil levant, nous commençâmes à gravir les flancs âpres et escarpés du Meï-ling. Il y a plusieurs chemins, mais on ne se donne pas la peine de choisir ; presque tous présentent à peu près les mêmes difficultés. Cette multiplicité de sentiers vient du nombre considérable de voyageurs et de portefaix qui sont obligés de franchir cette montagne. C’est, en effet, le seul passage pour toutes les marchandises que le commerce de Canton déverse continuellement dans les provinces intérieures de l’empire. On ne peut voir, sans éprouver un serrement de cœur, tous ces malheureux chargés d’énormes fardeaux, se traîner péniblement sur ces routes tortueuses et presque perpendiculaires. Ceux que la misère condamne à ces travaux forcés vivent, dit-on, peu de temps. Cependant nous remarquâmes parmi ces longues files de portefaix quelques vieillards courbés sous leur charge, et pouvant à peine soutenir leur marche chancelante. De distance en distance, on rencontre des hangars en bambou, où les voyageurs vont se mettre un peu à l’ombre, boire quelques tasses de thé et fumer une pipe de tabac pour se donner un peu de courage.

Nous arrivâmes vers midi au sommet de la montagne. On y voit une sorte d’arc de triomphe, en forme d’un immense portail ; d’un côté finit la province de Kiang-si et de l’autre commence celle de Canton. Nous éprouvâmes comme une commotion involontaire, lorsque nous eûmes franchi cette porte, car nous mettions enfin le pied dans cette province qui communique directement avec l’Europe. Il nous semblait que nous étions seulement à