Page:Evariste Huc - Empire chinois ed 5 vol 2.djvu/62

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commençait enfin à pénétrer parmi les montagnes… Vous êtes de la frontière du Thibet, leur disait-il ; on voit bien à votre accent, à vos manières, à vos allures, que vous vivez tout près d’un peuple sauvage ; et puis, je suis bien sûr que c’est pour la première fois que vous cheminez dans le monde. Tout vous étonne ; il en est ainsi de ceux qui ne sont jamais sortis du lieu où ils sont nés… Il s’amusait ensuite à leur signaler une foule de contrastes entre leurs habitudes et celles des habitants du Hou-pé.

Pour dire vrai, nos gens de Sse-tchouen se trouvaient grandement dépaysés depuis qu’ils avaient changé de province. On voyait qu’ils n’étaient presque plus au courant des mœurs et des coutumes des pays que nous traversions. Dans plusieurs endroits, on les raillait, on leur faisait des avanies, on cherchait surtout à leur extorquer des sapèques. Un jour, quelques soldats de l’escorte s’étant assis un instant devant une boutique, quand ils se levèrent pour repartir, un commis de l’établissement vint avec beaucoup de gravité demander deux sapèques à chacun, pour s’être reposés devant sa porte. Les soldats le regardèrent avec étonnement ; mais le malin commis tendit tout bonnement la main, de la façon d’un homme qui ne soupçonne même pas qu’on puisse faire la moindre objection à sa demande. Les pauvres voyageurs, attaqués dans le vif, c’est-à-dire dans la bourse, se hasardèrent à dire qu’ils ne comprenaient pas cette exigence… Voici qui est curieux, s’écria le commis, en faisant appel aux voisins, venez donc voir des hommes qui prétendent s’asseoir gratuitement devant ma boutique ; mais de quels pays viennent-ils donc,