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VOYAGE À VÉNUS

— J’approuve le patronage des sociétés, lui dis-je ; mais ici vous me paraissez soumettre la littérature au régime d’un vaste monopole qui la met dans la main de votre gouvernement.

— Pas plus que vous ne monopolisez la peinture et la sculpture en décernant à leurs productions remarquables les honneurs d’une exposition annuelle et d’une distribution de médailles. Nous avons pour nos théâtres subventionnés un jury impartial comme vous en avez un pour les Beaux-Arts, et, de même que votre jury artistique, il remplit sa mission en dehors de toute espèce de préoccupation gouvernementale ; nous permettons même aux auteurs d’exercer leur verve sur la politique. Nous n’interdisons que les pièces, qui, par d’ingénieux et subtils sophismes, tendent à ébranler le sentiment de nos devoirs dans la famille ou dans la société. Celles-là seules sont vraiment dangereuses : on sourit d’une plaisanterie un peu leste, mais, la lèvre détendue, il n’en reste aucune trace. Il n’en est pas ainsi d’un ouvrage qui, sous une forme attachante, soutient une thèse subversive : son influence délétère corrompt, jusque dans la racine, toute notion de saine morale, à ce point qu’on en arrive à se livrer au mal de gaieté de cœur, et que la conscience, cet ange gardien de notre âme, se fait la