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Page:Eyraud - Voyage à Vénus.djvu/127

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VOYAGE À VÉNUS

nous, son foyer spécial dans une partie de la salle.

— Vous n’avez donc pas de claque ? demandai-je à Mélino.

— Qu’est-ce que la claque ?

— Vous êtes bien heureux de l’ignorer ! c’est un groupe de gens, qui ne paient pas leurs places, mais qui sont payés pour applaudir à certains endroits de la pièce convenus d’avance, quand par exemple l’acteur crie un peu plus fort que de coutume ou lorsqu’il rentre dans la coulisse. À ces moments, vous voyez s’élever, du milieu du parterre, une vingtaine de paires de mains, grosses comme des gants d’escrime et rouges comme de la lie de vin : ces mains claquent bruyamment et retombent ensuite avec un ensemble tel qu’on les croirait mues par un ressort. Une machine pourrait, du reste, les remplacer avec avantage : elle serait tout aussi intelligente et tiendrait moins de place.

— Alors, me dit en riant Mélino, vos artistes entendent avec satisfaction et orgueil les applaudissements qu’ils ont soldés d’avance ! Ils me paraissent, en cela, ressembler à certain jeune homme qu’un amour dédaigné avait exalté jusqu’au délire, et qui, pour tromper sa passion, s’était avisé de s’écrire et de s’envoyer les lettres les plus tendres, en les signant du nom de celle qu’il aimait.