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LES FÉES DANS LES POÈMES DE MARIE DE FRANCE

détails familiers de la vie contemporaine. Par elle, nous savons comment les jolies dames du temps priaient les vaillants chevaliers de s’asseoir à leur côté sur un tapis, et comment elles leur tenaient de tendres discours. La sagesse de Marie de France n’est point farouche, et sa morale n’a rien de rigoureux. Avec elle, dès que l’amour est en jeu, sa cause est gagnée, et les fées ne feront pas exception à la règle : elles seront belles et elles aimeront. Faut-il en conclure que Marie fut elle-même une grande amoureuse ? Je ne le croirais pas. Elle était trop occupée des récits d’amour et de la musique des harpeurs bretons, pour que l’on puisse croire que le romanesque ait eu place dans sa vie. Ce ne dut être chez elle que passion littéraire.


I


Les deux lais de Lanval et du Graelent répètent à peu près une même histoire.

L’attribution du second à Marie est controuvée, celui de Lanval lui demeure. Ils célèbrent des événements qui se passent au temps du roi Arthur. Le monarque de la légende vient de tenir une cour plénière, mais le chevalier Lanval s’attriste de n’avoir reçu aucune part de ses bienfaits. Deux belles damoiselles, vêtues de pourpre grise — c’était une élégance de l’époque — viennent l’inviter à se rendre auprès de leur maîtresse.

Celle-ci repose sur un lit magnifique, abrité d’une tente merveilleuse. Un aigle d’or surmonte cette tente, dont cordages et pieux ont un prix immense.