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LA VIE ET LA MORT DES FÉES


IV

DE BOJARDO À L’ARIOSTE


Bojardo mourut en 1494, laissant inachevée cette œuvre dont Isabelle d’Este lui demandait à grands cris la suite. Nicolo degli Agostini voulut la continuer : nous retrouverons chez lui Falérine, Alcine et d’autres fées, Dogliena, Zoofila. Il tente de faire revivre les jardins merveilleux ou funestes, mais il ne nous en donne que des imitations.

Pourtant ces personnages ont vécu : ce n’est pas pour rien que Bojardo a créé une Angélique, une Alcine, une Marphise, un Roland, un Astolphe, un Renaud. Ils ont vécu d’abord dans l’éclatante fraîcheur de cette jeune poésie chevaleresque, puis ils se sont élancés hors de la danse légère des strophes, pareille aux rondes des fées et aux ébats des nymphes, pour continuer à vivre dans le rêve des contemporains. Agostini ne fut pas le seul à les évoquer. Dans la ville de Ferrare vivait Francesco Bello, que l’on croit originaire de Florence, et qui reprit aussi la tradition des aventures chevaleresques. Il chanta Membriano, neveu du roi de Bithynie, qui fit prisonniers plusieurs paladins, fut vaincu par Renaud, et sauvé par une magicienne, Carandine, qu’il épousa ensuite. Cette Carandine possédait une île, comme toutes les fées dignes de poésie. L’œuvre de ce Francesco Bello, dit le Cieco, eut ses admirateurs, mais les fées y sont privées de leur atmosphère féerique ; elles ne semblent pas, à pro-