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LA VIE ET LA MORT DES FÉES

s’étonner de voir la sérénité marmoréenne des beaux visages se perdre en une grimace burlesque. On a besoin de s’amuser, et dame ! on joue avec un pantin, et pas avec une statue.

L’histoire de Peruonto en est un exemple. Pour avoir rendu service à trois adolescents fils d’une fée, ce hideux Peruonto obtient la faculté de voir tous ses vœux se réaliser. Il souhaite que la jeune princesse, fille du roi, devienne mère de deux jumeaux. De là, scandale de la cour et du royaume. Le roi, courroucé, fait enfermer sa fille dans un coffre, et, la culpabilité de Peruonto s’étant révélée, il inflige le même sort au monstre et aux deux jumeaux, puis le coffre est jeté à la mer. Ici, nous reconnaissons une réminiscence de Danaé. Fort heureusement, Peruonto n’a pas épuisé dans ce vœu bizarre et périlleux toute sa puissance, il fait aborder le coffre dans une île, le transforme en château merveilleux, et se métamorphose lui-même en prince jeune, beau, charmant, digne d’être aimé de la princesse. Il aurait dû commencer par là. Le roi qui chasse dans ces parages est émerveillé du château et de ses habitants ; il pardonne. Une réconciliation suit ces fantastiques aventures. Peruonto s’est trouvé soudainement embelli, comme Riquet à la Houppe, mais qu’il y a loin de Basile à Perrault, de la farce napolitaine au conte français si élégant, si délicat ! Ce pauvre Peruonto serait embarrassé de trouver les belles phrases de Riquet, pour causer avec sa princesse.

Ainsi se déforme et se vulgarise une légende grecque accueillie sur le rivage napolitain, mais un souffle d’Égypte, une autre vague de la Méditerranée semblent avoir jeté sur ces plages l’histoire du Chat mystérieux dont Perrault fait notre Chat