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Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/279

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LES FÉES DE LA FRANCE CLASSIQUE

sonne ne dit plus autour de la petite reine étrangère ; la camerera-mayor est le type de toutes les geôlières des contes, de Truitonne ; ou de sa mère, et le fameux Antojo possède toutes les vertus d’un irrésistible talisman.

La délicieuse imagination de l’inquiétante Mme d’Aulnoy trouve dans le monde féerique un sujet qui la ravit. Où donc a-t-elle ramassé ses histoires ? Les contes de chats, nous enseignent les savants, sont originaires d’Égypte, mais la Chatte-Blanche de notre autoresse, si elle a quelque aïeule égyptienne, ne fait guère mine de s’en souvenir. Elle montre toutes les délicatesses et toutes les sensibilités d’une petite princesse élevée à Versailles ou d’une jeune marquise adulée dans les salons de Paris. Elle porte à la patte un bracelet avec le portrait d’un amoureux qui perdit la vie pour elle. Elle marche voilée de deuil, et sait, quand il le faut, soupirer ou lever les yeux au ciel. Elle tient à l’étiquette et n’omet pas un détail de politesse raffinée. La description de son château mérite qu’on s’y arrête. Ces escarboucles lumineuses qui l’éclairent au dehors ressemblent assez à des ampoules électriques. Mais l’électricité n’était pas utilisée aux jours de Mme d’Aulnoy. On pénètre d’abord dans un vestibule incrusté de porphyre et de lapis où l’on est servi, guidé, poussé par des mains appartenant à des êtres invisibles. Mme d’Aulnoy a-t-elle voulu figurer ici les mains multiples et mystérieuses dont se sert la destinée pour conduire quelqu’un au but assigné par elle ? Le prince va de splendeur en splendeur : porte de corail, salon de nacre, chambres ornées de peintures et de pierreries, resplendissantes de mille lumières. Toutes les distractions du