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LA FÉERIE ALLEMANDE : LES GRIMM

ondines, n’ont point d’âme ; seulement, elles peuvent en acquérir une, quand elles sont aimées par un homme doué d’une âme immortelle. Aussi le père d’Ondine l’a-t-il envoyée parmi les hommes, afin qu’elle gagnât son âme. L’amour d’Huldbrand, le beau chevalier, opère le prodige.

Il y a des scènes gracieuses : « Ma jeune et charmante damoiselle, dit le vieux prêtre, en vérité, il est impossible de vous voir sans être réjoui ; mais pensez aussi dans cette circonstance à mettre votre âme en harmonie avec celle du fiancé qui vient de vous être uni. — Mon âme ? répondit Ondine en riant, ce mot-là est très joli à entendre, et il se peut que, pour la plupart des gens, ce mot-là soit très utile et très édifiant ; mais pour qui n’a point d’âme, je vous prie, comment est-il possible de se mettre en harmonie avec une autre âme ?… » Un peu plus loin : « Ce doit être quelque chose de bien doux, mais aussi de bien terrible, d’avoir une âme. Au nom de Dieu, dites-moi s’il ne serait pas meilleur de n’en avoir jamais ?… Oui, l’âme doit peser d’un poids très lourd, car voici seulement que, de sentir une âme prête à s’éveiller en moi, je me sens en même temps envahie par l’affliction, moi qui étais si insouciante et si joyeuse. »

Plus tard, lorsque l’âme sera éveillée en elle, Ondine demandera au vieux prêtre, avec émotion, de prier pour le salut de son âme. Pauvre Ondine ! Malgré la farouche protection de son vieil oncle Kühleborn, le torrent de la forêt, elle connaîtra l’amertume des trahisons humaines, l’inconstance des cœurs humains, car Huldbrand retrouvera Bertalda, sa première bien-aimée, qui n’était autre que la fille disparue du vieux pêcheur. Ondine, désolée, doit