Page:Félix-Faure-Goyau - La vie et la mort des fées, 1910.djvu/40

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
28
LA VIE ET LA MORT DES FÉES

chaque strophe débute par les mots Doux pommier : on y discerne, dans une sorte de lointain, certains échos très anciens qui semblent révéler, avec une âme de poésie séculaire, les mystérieuses espérances d’une race vaincue. Merlin y pleure la mort de son neveu, fils de sa sœur Ganieda, mort involontairement causée par lui-même, et il regrette de ne pas avoir cessé de vivre auparavant.

Le chant des Pommiers, de ces pommiers qui couronnent, de leur grâce fleurie, l’île heureuse de Morgane, célèbre, semble-t-il, tous les aspects de l’arbre cher aux Bretons.

Doux pommier aux branches charmantes, qui bourgeonnes vigoureusement et produis des rejetons renommés… Doux pommier, arbre aux fruits verts, aux pousses luxuriantes… Doux pommier, arbre aux fruits jaunes… Doux pommier qui croîs dans la clairière… Doux pommier aux fleurs charmantes qui croîs caché dans les bois… Doux pommier qui croîs auprès du fleuve… Doux pommier aux fleurs délicates, qui croîs dans un champ, parmi d’autres arbres… Doux pommier aux couleurs vermeilles qui croîs caché dans la forêt de Kelyddon…

À chacune de ces évocations du pommier se suspend, sous la forme d’une strophe, une espérance guerrière ou quelque souvenir de la vie de Merlin.

Doux pommier, arbre aux couleurs cramoisies, qui grandis caché dans les bois de Kelyddon, on te recherche pour tes fruits, mais ce sera en vain jusqu’à ce que Cadwaladyr vienne de la conférence de Rhyd-Réon, et qu’un Konan s’unisse à lui pour attaquer les étrangers ; alors les Cambriens seront victorieux, leur dragon sera glorifié, chacun retrouvera ses biens, les cœurs bretons seront joyeux. Allez, clairons, sonnez les fanfares de la paix et d’un temps meilleur.