Page:Fénelon - De l’éducation des filles. Dialogues des morts.djvu/183

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sagesse ; ce qui est le contraire des nations violentes et farouches qui ont été nourries dans les pays sauvages du Nord. Il n’y a guère d’apparence non plus que les hommes soient arrivés à la Chine par la mer : les grandes navigations n’étaient alors ni usitées, ni possibles. De plus, les mœurs, les arts, les sciences et la religion des Chinois se rapportent très bien aux mœurs, aux arts, aux sciences, à la religion des Babyloniens et de ces autres peuples que nos histoires nous dépeignent. Je croirais donc que quelques siècles avant le vôtre, ces peuples asiatiques ont pénétré jusqu’à la Chine ; qu’ils y ont fondé votre empire ; que vous avez eu des rois habiles et de vertueux législateurs ; que la Chine a été plus estimable qu’elle ne l’est aujourd’hui pour les arts et pour les mœurs : que vos historiens ont flatté l’orgueil de la nation ; qu’on a exagéré des choses qui méritaient quelque louange ; qu’on a mêlé la fable avec la vérité, et qu’on a voulu dérober à la postérité l’origine de la nation, pour la rendre plus merveilleuse à tous les autres peuples.

Confucius. — Vos Grecs n’en ont-ils pas fait autant ?

Socrate. — Encore pis : ils ont leurs temps fabuleux, qui approchent beaucoup du vôtre. J’ai vécu, suivant la supputation commune, environ trois cents ans après vous. Cependant, quand on veut, en rigueur, remonter au-dessus de mon temps, on ne trouve aucun historien qu’Hérodote, qui a écrit immédiatement après la guerre des Perses, c’est-à-dire environ soixante ans avant ma mort : cet historien n’établit rien de suivi, et ne pose aucune date précise par des auteurs contemporains, pour