Page:Fénelon - De l’éducation des filles. Dialogues des morts.djvu/430

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conduisant tout, et n’ayant point là de roi qui eût part à cette action, comme vous à La Rochelle et au Pas de Suse. Après la mort de Ferdinand, je fus régent dans l’absence du jeune prince Charles. C’est moi qui empêchai les communautés d’Espagne de commencer la révolte, qui arriva après ma mort : je fis changer le gouvernement et les officiers du second infant Ferdinand, qui voulaient le faire roi, au préjudice de son frère aîné. Enfin je mourus tranquille, ayant perdu toute autorité par l’artifice des Flamands, qui avaient prévenu le roi Charles contre moi. En tout cela je n’ai jamais fait aucun pas vers la fortune ; les affaires me sont venues trouver, et je n’y ai regardé que le bien public. Cela est plus honorable que d’être né à la cour, fils d’un grand prévôt, chevalier de l’Ordre.

Richelieu. — La naissance ne diminue jamais le mérite des grandes actions.

Ximénès. — Non ; mais puisque vous me poussez, je vous dirai que le désintéressement et la modération valent mieux qu’un peu de naissance.

Richelieu. — Prétendez-vous comparer votre gouvernement au mien ? Avez-vous changé le système du gouvernement de toute l’Europe ? J’ai abattu cette maison d’Autriche que vous avez servie, mis dans le cœur de l’Allemagne un roi de Suède victorieux, révolté la Catalogne, relevé le royaume du Portugal usurpé par les Espagnols, rempli la chrétienté de mes négociations.

Ximénès. — J’avoue que je ne dois point comparer mes négociations aux vôtres ; mais j’ai soutenu toutes les affaires les plus difficiles de