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Page:Fétis - Biographie universelle des musiciens, t1.djvu/74

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RÉSUMÉ PHILOSOPHIQUE

Palestine et de la Syrie, chez les Arméniens et chez les Juifs orientaux. Je prie le lecteur de m’accorder ici toute son attention, car il s’agit d’un fait historique d’une assez grande importance, que je crois avoir découvert et pour lequel je vais me trouver en opposition non seulement avec tout ce qu’on a écrit cette manière depuis des siècles, mais même avec les traditions répandues dans toute l’église grecque de l’Orient et de l’Occident.

Saint-Jean de Damas, ou Damscène, l’un des pères de l’église, qui vécut dans le huitième siècle, est considéré dans toute l’église grecque de l’Orient comme le restaurateur du chant de cette église, et comme l’auteur d’un grand nombre d’hymne qu’on chante encore. Mais ce n’était point assez de la portion de gloire qui paraît lui appartenir à cet égard, plusieurs auteurs ont aussi supposé qu’il fut l’inventeur de la notation singulière qui est en usage parmi les chrétiens grecs orientaux. Il est certain qu’au nombre des traités du chant de l’église grecque qu’on trouve en manuscrit dans l’Orient, il en est un qui semble fort ancien et qui porte le nom de Jean Damascène ; mais dans l’explication des signes employés pour la notation de ce chant, il n’y a pas un mot qui puisse faire croire que le saint en soit l’inventeur. Nul doute que, trouvant dans la musique grecque une notation toute faite et d’un usage facile, il ne l’eût adoptée, si cette notation eût répondu à la nature des mélodies dont on faisait usage dans les églises et dans les monastères grecs de l’Égypte, de la Syrie et de la Palestine ; mais la notation grecque, destinée à représenter une musique simple et rhythmée, pouvait s’appliquer à ces mélodies orientales, surchargées d’ornemens. Ainsi que je l’ai dit, ces ornemens du chant sont un type de l’Orient, tandis que le chant simple et syllabique appartient à l’Occident. Il fallait donc aux peuples orientaux une notation de groupes de sons, comme il en fallait une de sons isolés aux Grecs et aux Romains. Or, par cela même que la notation par groupes de sons était une nécessité pour la musique de l’église grecque de l’Égypte et de la Syrie, il n’est pas vraisemblable que cette notation n’ait pris naissance qu’au huitième siècle, ni que ce soit un moine de ce temps qui l’ait inventée. Je ne doute point qu’elle a appartenu à l’antique Égypte, et j’ai pour garant de mon opinion la similitude des signes de cette notation, attribuée faussement à saint Jean de Damas, avec ceux de l’écriture démotique ou populaire des anciens Égyptiens. Cette similitude a échappé aux recherches de touts les historiens de la musique : elle est assez curieuse pour que j’en donne ici quelques aperçus.

Dans le système de la notation du chant de l’église grecque, il n’y a pas