habitaient en Égypte, à l’époque où l’armée française en fit la conquête. On a vu, dans ce qui précède, que le caractère général de l’art musical s’est conservé dans cette partie de l’Orient tel qu’il était dans l’antiquité ; il y a donc lieu de croire qu’une partie si importante de cet art qu’est l’harmonie ne se serait pas absolument anéantie si elle eût existé autrefois. Ce n’est pas seulement l’ignorance de l’harmonie qu’on remarque chez les Arabes, les Grecs, les Éthiopiens et les Juifs ; c’est incapacité absolue d’en comprendre les effets, par suite de leur éducation. La réunion harmonieuse des instrumens dans la musique militaire des régimens français, loin de charmer leur oreille, leur était importune. Il est vrai que les peintures des tombeaux et les sculptures des temples de l’Égypte nous font voir des harpistes qui jouent de leurs instrumens avec les deux mains, ce qui semble indiquer l’emploi simultané des sons ; mais j’ai déjà fait observer que le système mélodique embrassait une grande étendue de sons, et qu’il était chargé d’ornemens de tous genres ; en sorte qu’il est possible que l’emploi des deux mains ait été nécessaire pour de simples mélodies. D’ailleurs, il se peut aussi que les égyptiens aient fait usage de l’antiphonie, c’est-à-dire de l’exécution des chants à l’octave : ce genre d’harmonie qui, je le ferai voir, a été connu des Grecs et des Romains, résulte naturellement de la réunion des voix de femmes et d’hommes : les peuples de l’Orient de nos jours l’emploient, même dans leurs concerts d’instrumens.
Pour achever de donner à mes lecteurs des notions de la musique des peuples orientaux, il me reste à exposer le système de cet art chez les Arabes et chez les Persans. Je réunirai ce que j’ai à dire de ces peuples, parce que l’analogie de la musique de l’un et de l’autre est telle qu’il serait difficile d’y remarquer quelque différence, si le mode d’exécution ne faisait sentir, dans la musique persane, une certaine douceur qui manque à l’arabe, et qui est le résultat d’une civilisation plus avancée.
L’histoire de la musique arabe a ses merveilles et ses miracles, comme celle de cet art chez tous les peuples anciens. De célèbres musiciens arrivent inconnus à la cour des sultans et des khalifes ; ils prennent un luth, excitent à leur gré toutes les passions dans l’ame de ceux qui les écoutent, les plongent dans le sommeil, disparaissent mystérieusement comme ils sont venus, et ne sont reconnus après leur départ, que par leur nom qu’ils ont écrit sur le manche de leur instrument. Tel est l’enthousiasme des peuples de l’Orient pour la musique, que pour donner une idée de sa puissance, ils ont eu tous