Page:Féval - L’Arme invisible, 1873.djvu/120

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dépourvu d’une certaine élégance : elle avait un jupon de laine rouge retroussé abondamment qui craquait autour de ses hanches robustes ; une basquine de velours noir frangée de paillettes emprisonnait les surprenants trésors de son torse, et dans ses cheveux, qui étaient noirs et très beaux, un collier de perles fausses s’enroulait.

Deux personnages, qui tenaient à la vérité très peu de place, étaient avec elle dans la chambre et semblaient flairer avec gourmandise la fumée de la casserole. Tous deux avaient à peu près le même âge, une quarantaine d’années, et le même aspect d’indigence ; mais là s’arrêtait la similitude.

L’un d’eux, en effet, debout auprès de la porte, souriait d’un air avantageux en ramenant sur ses tempes deux mèches de cheveux jaunâtres, qu’on eût dit graissées à l’aide d’un bout de chandelle.

Il avait une redingote vert pomme veuve de ses boutons, un pantalon écossais percé aux deux genoux et des bottes sans talons dont les bouts se relevaient à la poulaine.

Sa main gauche, aux ongles longs et noirs, tenait un chapeau gris tirant sur le roux, dont les bords cassés tombaient en parapluie.

C’était avec une fierté naïve qu’il portait ces débris, de même que sa figure plate et laide exprimait une fatuité enfantine.

Il cambrait orgueilleusement ses jambes, qui étaient bien musclées, et le sourire qu’il adressait à Mme Samayoux n’aurait point été déplacé sur les lèvres de don Juan.