Page:Féval - L’Arme invisible, 1873.djvu/242

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— Le Père est le Père. Corona a mal parlé, comme toujours, et Marguerite regrette son impudence.

Les quatre membres dont nous venons de citer les noms s’inclinèrent gravement.

C’était un vote.

Corona retourna sur son canapé en grondant, et Mme de Clare, relevant son voile, vint offrir sa main au colonel.

— Le Père sait combien nous l’aimons, murmura-t-elle.

— Le Père est bien vieux, dit celui-ci, dont la voix, perdant le diapason de la colère, exprima tout à coup une larmoyante émotion : il a les faiblesses de son âge. Tout à l’heure, il disait, fanfaron comme ceux qui n’ont plus de force : « Je vous enterrerai tous !… » Ah ! mes pauvres enfants, les jours qui me restent à vivre sont comptés. Croyez-moi, pour attendre, il ne vous faudra pas grande patience. Marguerite, tu es belle, tu es jeune, tu as raison d’être ambitieuse ; tu souhaites de l’or, beaucoup d’or, tu en auras ; tu veux être duchesse, tu le seras.

Il l’attira jusqu’à lui et ajouta dans un baiser :

— Folle que tu es ! ne sais-tu pas que je t’ai instituée mon unique héritière ?

— Mes enfants, mes chers enfants, reprit-il tout haut, pardonnez à celui qui vous aime comme si vous étiez sa famille. Que Corona lui-même oublie une parole peut-être trop sévère ; sa conduite envers ma pauvre petite Fanchette me laisse bien de l’amertume dans le cœur. Ah ! si j’avais donné ce cher