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LA BANDE CADET

sur le guéridon. Sa face était marbrée de rouge et de livide.

Morand, effrayé, essaya de résister ; mais le malade balbutia, en joignant ses mains :

— C’est la vie, misérable, que je te demande ! veux-tu donc m’assassiner !

Morand courut vers la table ; il tremblait comme la feuille, en versant le vin, et M. de Clare disait :

— Un plein verre ! un plein verre ! j’ai soif de force ! j’ai soif de haine ! ne devines-tu pas ? Elle mettra son fils à la place de mon fils. Qui donc connaît ces deux enfants ? Qui donc découvrira la supercherie ? Et mon fils sera un malheureux ! Et le fils de l’autre sera duc de Clare ! Ah ! par la mordieu, je ne veux pas ! Un plein verre, mon cousin ! Un plein verre !

Morand l’apportait, le plein verre, et à deux mains, car la frayeur le secouait de la tête aux pieds.

À deux mains aussi M. le duc prit le verre.

On entendit, encore une fois, ce bruit de crécelle du cristal, soubresautant et craquant contre les dents convulsivement serrées.

M. de Clare but tout et resta l’œil grand ouvert,