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DEUXIÈME PARTIE

— Tuer lentement, murmura Crackenwell, — ou tuer d’un seul coup, c’est toujours tuer, milord.

Montrath mordit sa grosse lèvre et s’agita sur les coussins.

Crackenwell croisa ses jambes et se mit de plus en plus à l’aise.

— Savez-vous, milord, reprit-il, que mon métier n’est pas des plus agréables ici ?…

— Ne gagnez-vous pas suffisamment ? demanda Montrath.

— On ne gagne jamais suffisamment lorsqu’on a passé la quarantaine et qu’on a la prétention de jouir encore de la vie… Mais il ne s’agit pas de cela ; mes revenus sont honnêtes et je m’en contenterais à la rigueur, si je ne voyais pas toujours au-dessus de ma tête une épée suspendue par un fil… C’est renouvelé de Damoclès, et ce n’en est pas plus gai… Milord, j’aurais fantaisie de revoir Londres, et de laisser à un plus brave l’honneur de vous représenter dans le Connaught.

— Nous causerons de cela, Robin.

— J’aimerais en causer tout de suite.

— C’est que mes affaires sont dans un état !…

— Vous savez bien, interrompit l’intendant, qu’un millier de livres par mois suffit amplement à mon train de vivre.