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LES SAXONS.

qu’un pauvre jeune homme brisé par l’angoisse qui emportait dans ses bras sa femme à demi morte.

Morris avait entendu derrière lui la clameur guerrière. Il s’était arrêté pour écouter mieux. Son cœur s’était réjoui ; un espoir immense avait empli son âme.

Ce cri, c’était pour lui la promesse longtemps attendue. Il l’accueillit comme une révélation de ce que pouvait être l’avenir ; il y vit un augure. C’était le réveil d’un peuple, déchirant enfin le maillot de sa trop longue enfance.

Morris croyait cela, et il y avait en lui un flux de joie orgueilleuse.

— Non ! oh ! non, pensait-il, les fils de l’Irlande ne sont pas des lâches !… vienne l’heure du combat, et ils sauront mourir !

Mais on savait déjà dans la galerie que la plage était solitaire. Cette nouvelle s’était propagée de bouche en bouche, depuis les premiers rangs jusqu’aux derniers, et la fougue fanfaronne naturelle au peuple irlandais, exagérant aussitôt cet élan passager de vrai courage, la voûte retentit de bravades insensées et de vanteries que n’auraient point reniées nos riverains de la Garonne.

Les dragons anglais, si redoutables naguère,