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TROISIÈME PARTIE.

l’écriture aimée, ou pour essuyer ses yeux que les pleurs aveuglaient.

— C’est bien vrai ! murmurait-il ; c’est moi… c’est moi tout seul qui lui ai fait ce malheur !… je suis la cause de son martyre !… Mon père et mes frères l’auraient sauvée ; mais moi… oh ! que maudit soit mon orgueil !… Devais-je croire que Dieu eût permis la chute de cet ange ?… devais-je me la représenter jamais autrement que pure et sans tache ?… Je l’ai jetée dans cette tombe où elle m’appelle en vain… c’est par moi qu’elle souffre, par moi seul !… Oh ! seigneur Dieu ! écoutez ma prière et permettez-moi de la sauver !

Il tournait la page. Le parfum de résignation douce qui embaumait chaque ligne du récit de la pauvre fille amollissait le cœur de Morris. Son âme s’affaissait, énervée par la douleur ; ce n’était plus ce rude courage bravant tout, et sachant se roidir contre toute plainte qui n’était pas celle de l’Irlande.

Le souvenir de la patrie elle-même se voilait devant l’image adorée de la jeune fille.

Il tressaillait à son cri d’agonie. Tout le reste était oublié ; il n’y avait plus rien en lui qui ne fût amour.

Jessy, rien que Jessy !