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QUATRIÈME PARTIE.

Et que d’allégresse haineuse ! quelle colère triomphante ! Ces gens qu’il avait muselés durant des mois allaient bondir autour de lui comme des dogues dont la chaine est brisée !

Et comment se défendre, puisque son juge était Brazer ?

Il entendait d’avance la voix de Brazer qui lui criait : « Vous avez fui ! vous avez fui !… »

Lui dont la vie entière était un modèle d’honneur militaire, c’était comme soldat qu’il allait être déshonoré…

Il souffrait, mais il avait de la joie, parce que cette femme si noble, si belle, si parfaite, venait de lui montrer son cœur et de lui prouver avec quel dévouement elle l’aimait.

— Merci ! répéta-t-il en tenant la main de l’heiress appuyée contre son cœur.

Son visage était redevenu serein. Il avait accepté sa destinée, ou peut-être son ferme courage gardait-il un vague espoir de vaincre, malgré la profondeur de sa chute.

En ce moment il était tout à Ellen, qui devinait sa pensée, et qui souriait, reconnaissante. Le sang perdu lui laissait une faiblesse extrême, mêlée de lassitude et de trouble, mais il ne sentait point sa blessure.

Ses yeux étaient chargés de fatigue ; il voulait