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QUATRIÈME PARTIE.

Pat venait de voir Morris Mac-Diarmid toujours assis à la même place, immobile, pâle et la tête renversée contre la muraille.

Les yeux de l’ancien garçon de ferme, démesurément ouverts, semblaient prêts à saillir hors de leurs orbites.

— Le monstre ! murmura-t-il d’une voix étouffée. Jésus ! sainte Vierge Marie ! oh ! bon saint Patrick ! Il sera venu et il aura étranglé le pauvre Morris !…

Il faisait noir comme dans un four, et Pat n’osait plus rallumer la branche de pin.

— Malheureux ! malheureux ! reprit-il. Il devait avoir grand’faim, car voilà trois jours que je l’ai oublié !

Depuis trois jours en effet, le pauvre Pat, absorbé par ses hautes préoccupations politiques, avait négligé les devoirs de sa charge, et refusé pâture au monstre nourri par l’intendant Crackenwell.

Le monstre devait avoir grand’faim ! et Pat, qui venait d’entendre sa plainte, trouvait que sa voix était considérablement affaiblie.

En ce premier moment de terreur, rien n’eût pu l’engager à porter immédiatement au monstre sa nourriture quotidienne. Il s’assit sur la paille, tremblant de tous ses membres, et se boucha les