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Page:Féval - La Rue de Jérusalem, 1868.djvu/357

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res qu’on prenait volontiers du temps de Louis-Philippe. Il n’était pas gracié ; on lui avait garanti tolérance.

Sa première entrevue avec Ysole fut clémente et douce, mais froide.

Il repoussa toute explication et défendit qu’il fût parlé du passé.

Thérèse Soulas n’osait pas se montrer. Il la fit venir et lui témoigna une sorte de déférence respectueuse.

— Vous n’avez pas le secret de Mlle Ysole de Champmas, lui dit-il avec une tristesse résignée, elle n’a point le vôtre : c’est bien ainsi. N’allez pas au-delà, et vivez en paix près de nous, je le veux.

Ce fut, pour Ysole, un intérieur bien autrement morne et glacé que la vie même du couvent.

Le général semblait frappé au cœur.

Il ne parlait jamais de Suavita ; mais quand la famille se fut installée au château de Champmas, le général ne laissa que deux portraits dans sa chambre à coucher, celui de Suavita et celui de la mère de Suavita.

Ysole sortait tous les jours à cheval, et faisait de longues promenades solitaires. Nul ne contrôlait ses actions.

Elle ne voyait personne. Elle avait fait seulement, depuis son arrivée, deux ou trois visites à la comtesse de Clare.

Un jour elle dit à Thérèse Soulas :

— Il y a un jeune homme qui me suit. Je me trouve mal dans la maison de mon père. Si un ouvrier ou un paysan voulait de moi pour femme, j’essaierais d’être une bonne ménagère…

Elle acheva en baissant la tête et en parlant pour elle seule :